Expérience d'Aspect : La mécanique quantique stipule que deux systèmes quantiques différents (deux particules par exemple) ayant interagi, ou ayant une origine commune, ne peuvent pas être considérés comme deux systèmes indépendants. Le formalisme quantique prévoit que si une opération de mesure est effectuée sur ce système quantique intriqué, alors cette opération est valable pour les deux systèmes composant l'intricat, quel que soit l'éloignement des deux composantes. Ce résultat a profondément choqué Albert Einstein, qui n'acceptait pas qu'il existe une influence se propageant d'un système à l'autre, à une vitesse suppérieure celle de la lumière. Le schéma de principe à partir duquel John Bell a démontré ses inégalités est composé d' une source de photons intriqués S qui émet simultanément deux photons v1 et v2 dont la polarisation est telle qu'ils sont tous deux en polarité verticale, ou tous deux en polarité horizontale, perpendiculaire, avec une probabilité égale. La source utilisée est une cascade atomique d'atomes de calcium, excitée à l'aide d'un laser à krypton. Ces deux photons sont ensuite mesurés par deux polariseurs P1 et P2, chacun ayant un angle de mesure paramétrable a et b. Le résultat de la mesure de chaque polariseur est (+) ou (-) selon que la polarisation mesurée est respectivement parallèle ou perpendiculaire à l'angle de mesure du polariseur. Afin d'éviter les corrélations parasites lors de la mesure, les polariseurs P1 et P2 étaient séparés de 6m de part et d'autre de la source, et de 12m l'un de l'autre. Cela donnait un temps de 20ns entre l'émission des photons et la détection : c'est le laps de temps extrêmement court pendant lequel il fallait décider de l'orientation et orienter les polariseurs. Comme il est physiquement impossible de changer matériellement l'orientation d'un polariseur dans ce laps de temps, deux polariseurs par côté ont été utilisés, pré-orientés différemment. Un « aiguillage » à très haute fréquence de basculement orientait aléatoirement le photon vers l'un ou l'autre de ces polariseurs. L'ensemble de ce dispositif était équivalent à un seul polariseur dont l'angle de polarisation bascule aléatoirement. Les polariseurs à deux canaux (+) et (-) utilisés étaient des cubes polarisants, transmettant une polarité et réfléchissant l'autre, émulant un dispositif de Stern-Gerlach. La mécanique quantique permet de prédire les probabilités de mesurer (+,+), (-,-), (+,-) et (-,+) Les expériences d'Aspect ont confirmé sans ambiguïté la violation des inégalités de Bell exactement de la manière prédite par la mécanique quantique, avec un accord statistique jusqu'à 40 puis 100 écarts types ! En 1998, l'expérience de Genève a testé les corrélations entre deux détecteurs distants de 30 kilomètres, en utilisant le réseau suisse de télécommunication par fibre optique. Cette distance laisse beaucoup plus de temps pour commuter les angles des polariseurs et il a donc été possible de mettre en place un aiguillage purement aléatoire. D'autre part, les deux polariseurs éloignés étaient complètement indépendants et les mesures ont été enregistrées de chaque côté, puis comparées après l'expérience, en datant chaque mesure à l'aide d'une horloge atomique. La violation des inégalités de Bell a une nouvelle fois été vérifiée dans ces conditions strictes et presque idéales. Si l'expérience d'Aspect impliquait qu'un hypothétique signal de coordination se déplace deux fois plus vite que c, celle de Genève arrivait à 10 millions de fois c. Aucun physicien ne pense que ces résultats remettent en cause le principe de relativité selon lequel nulle forme d'énergie (matière ou force), nulle information utilisable, ne peut se déplacer à une vitesse supérieure à celle de la lumière. Il est en effet facile de montrer que l'intrication quantique ne peut être utilisée pour transmettre de façon instantanée quelque information que ce soit d'un point de l'espace-temps à un autre ! aucune information utilisable ne peut être séparément tirée de ces mesures sur le moment, et les corrélations resteront indétectables tant que les résultats de ces deux séries de mesures ne seront pas comparés d'une façon classique. Décohérence quantique : Tous les objets décrits par la physique classique (projectile, planète, chat, etc.) étant composés, en dernière analyse, d'atomes et de particules, et ces derniers étant décrits entièrement par la physique quantique, il est logique de considérer que les règles de la physique classique peuvent se déduire de celles de la physique quantique. Or, les tentatives en ce sens ont posé de nombreux problèmes dès le départ et pendant très longtemps. La théorie de la décohérence est à ce jour une des tentatives les plus satisfaisantes en ce sens, bien qu'elle ne traite pas la totalité des problèmes. Le problème majeur est que la physique quantique admet des états superposés, absolument inconnus à un niveau macroscopique décrit par la physique classique. La théorie quantique tient compte de cette non-observabilité des états superposés quantiques en stipulant que tout acte d'observation provoque un effondrement de la fonction d'onde, c'est-à-dire sélectionne instantanément un et un seul état parmi l'ensemble des états superposés possibles. L'idée de base de la décohérence est qu'un système quantique ne doit pas être considéré comme isolé, mais en interaction avec un environnement agité. En conséquence, la probabilité d'observer un état superposé tend exponentiellement vers zéro, en quelques fractions de secondes dans l'air ambiant. La théorie de la décohérence prévoit qu'un certain temps est nécessaire pour que les déphasages s'accumulent, et finissent par rendre négligeables la probabilité des états superposés.